Troisième Partie
Le marché, la perte des repères, la crise des valeurs : quelles réponses ?


Intervenants :
Maurice-Ruben Hayoun, écrivain, philosophe
L'auteur, entre autre, d'un petit "Que Sais-je ?" sur Avéroès avance une thèse puissante et inspirée sur l'esprit de Cordoue qui a captivé la salle. Il parle d'abord du sauvetage d'un partie de la culture grecque tardive (Platon, Aristote, et certains pré-socratiques) disparue en partie à Alexandrie dans la traduction qu'en font des frères Nestoriens de Syrie au 8ème siècle après JC. C'est LA PREMIERE ENCYCLOPEDIE de l'histoire, l'Irowan al Sofah (Frères de la "pureté" où pureté est entendu au sens de vérité). Ils sont des "fallasifah" (orthographes arabes à préciser, NDLR), soit des "philosophes", des néo-aristotéciens qui vont féconder toute l'Europe. Averoès sera le pendant à Cordoue de ce mouvement. Il affirme, que la vérité, dieu, est universelle.Les textes sacrés (la vérité) ne saurait contredire la vérité. Au contraire, elle témoigne en sa faveur et elle la renforce.

C'est l'affirmation absolue de l'universalisme. Les croyances sont complémentaires entre elles. On peut être fraternels sans être fratricides. C'est bien l'esprit de Cordoue qui a des traductions actuelles dans la vision synchrétique des origines des monothéismes où Abraham a chaque fois, part prenante.

Maurice-Ruben Hayoun répond à une question sur la franc-maçonnerie dont il ne fait pas partie, en disant qu'historiquement, tout était intellectuel et philosophique. Les loges étaient les premiers espaces de liberté, d'émancipation par rapport à la religion dans le corps social. Elles ont permis le dialogue. Francfort sera la première loge a accueillir des juifs au 18ème siècle (à vérifier, NDLR). Selon Jacob IV, le religieux des loges était neutre.

cf : "Des Lumières de Cordoue à Bâle
" de Maurice-Ruben Hayoun, 1200 pages.

Mais il faut faire une critique des francs-maçons eux mêmes qui sont allés trop loin. "Je préfère les idées aux supports humains censés les incarner". Et les révéler, puisque dans le champ social, elles sont invisibles (NDLR). Averoes avait conseillé les princes. "Les textes révélés ne contiennent pas la vérité, mais ils nous guident vers elle..." D'où l'interprétation de contenus qui restent avant tout anthropologiques.

"Seigneur, tu as dit un mot et j'en ai entendu deux..." Référence à l'auteur allemand Lessling (à chaque étape du genre humain correspond l'affirmation d'une vérité). Averoes préfère dire que la religion guide vers la vérité.




Il insiste sur le développement des lumières. Spinoza est le grand philosophe qui va révolutionner la conscience européenne. En écrivant l'Ethique, il va contrer la religion. Il sera à l'origine de la crise des croyances européennes. Philosophie et religion ne parlent pas de la même chose avec des mots différents selon Spinoza, mais, selon l'auteur, il se trompait. Vallaloïd produit cette critique qui va provoquer les lumières. Il est le premier à renier sa religion sans en embrasser une autre !

Die Aufklarung, the Enlightment n'a pas été un vrai mouvement de libération intellectuelle et spirituelle (sic) car il ne disposait pas de ressources conceptuelles suffisantes pour éviter la Shoah.

Mais l'Europe doit à nouveau jouer ce rôle de phare culturel du monde, bien qu'il faudrait trouver un autre mot que culturel. Ce pourrait être cette fameuse notion de laïcité, sans passer par un "Bombastik of Talk".
Il faut promouvoir le respect et l'éthique, et pour celà, peut être, aller se tourner vers leur traductions actuelles à travers l'œuvre d'Emmanuel Lévinas.

Mohamed Kacimi, écrivain dramaturge


Michel Blum, président d’honneur du comité spécial des ONG
droits de l’homme à l’ONU
défend les droits-humains, riche de son expérience aux Nations-Unis.

"Les hommes libres peuvent mourir de faim" - François Mitterrand

Il n'y a plus deux camps qui s'affrontent, mais un camp et un autre qui se cherche. Il faut renforcer l'ONU et la coopération, car il y a urgence.

Daniel Mesguish, metteur en scène, comédien

Le Metteur en scène livre un brillant réquisitoire contre les points qui, dans la culture, posent aujourd'hui problème et lance un certain nombre de pavés salvateurs dans la mare des conformismes ambiants. Jugez-plutôt :

Selon lui, la culture souffre de l'espèce de redondance des mises en scènes télévisuelles, notamment en ce qui confirme les infos, où il faut sans cesse confirmer, ce que des images, qui sont souvent d'une platitude totale (une immeuble dans lequel il se serait passé quelque chose...) ne disent pas, et donc mentent, sont susceptibles d'entretenir de toutes sortes de rapports faussés avec la vérité.

A ce sujet, il parle de l'exemple de son épouse, professeur dans le XIXeme arrondissement à Paris pour des classes qui sont essentiellement constituées de jeunes d'origines diverses ou "issus de l'immigration". Ceux-ci réfutent des arguments qui reposent sur des fait avérés. Un cours sur les grands monothéismes, une analyse chronologique de la naissance des grandes religions est contestée par un élève. Le message exclusiviste de certains "prédicateurs" islamistes exclut toute autre forme de vérité, toute espèce de questionnement. A l'heure qu'il est ce garçon est toujours persuadé que l'Islam est la première religion à avoir fait son apparition, en contradiction absolue avec la vérité historique. Pareil lors d'un cours sur les cellules sexuelles et la génétique. Une élève conteste le cours pour affirmer que nous descendons d'Adam et Eve. A ce jour, elle n'a pas changé d'avis.

Ce qui change, ce sont les revendications autour de la tolérance (ta vérité vaut la mienne, tu es moi, je suis toi, nos rôles sont interchangeables, il n'y a plus d'échelle de valeurs qui vaille, prime ou fasse sens) qui dans ce contexte devient un mot chargé de connotations extrêmement antipathiques. Il y voit pourtant une raison d'espérer des améliorations, y compris dans le crime raciste et religieux d'un jeune écolier juif qui vient d'avoir lieu, y compris dans la violence qui traduit un malaise, un aveu de faiblesse et d'incertitude.
Si au fond, on n'était sûr de la primauté de son dieu, on aurait pas besoin d'assassiner celui de son "adversaire". Il y a une faille dans chaque chose, dans chaque opinion, même dans les plus apparemment unanimistes.

Il y a beaucoup de malaises, et donc beaucoup de chances pour que des terres d'accueil, des choses et des rapports différents s'établissent. Pourtant, tout en notant que la télévision n'est au fond qu'un appareil électroménager, comme le grille-pain, il rappelle que le vrai nom de la TV dite populaire (TF1, M6, ...), c'est "télévision commerciale", c'est à dire un outil qui a pour parti-pris de s'occuper du monde tel qu'il est (donc conjugué au passé), et non d'un monde en devenir qu'on chercherait à faire évoluer vers un mieux.
Le théâtre, lui, ne s'adresse pas au public qui est dans la salle, mais à l'humanité toute entière, donc à tous, y compris aux morts, comme c'est le cas de tous ceux qui détiennent un pouvoir issu d'une délégation démocratique. A méditer... 7% des gens vont au théâtre un fois par an. 93% se foutent donc tout à fait de ce que nous y faisons. Nous nous adressons donc à ceux qui ne consomment pas. Les intellectuels ne font pas leur boulot quand il s'abrutissent, même dans une posture au second degré, dans le télé réalité ou le foot.

A Los Angeles, deux équipes s'affrontent et se tuent, parce certains portent des fanions bleus et les autres, des fanions rouges. Mais on ne se bat pas pour un mieux ou pour des idées, mais simplement par goût creux pour la confrontation. Rien dans le foot ne remet en cause la situation. La télévision, où certains insomniaques regardent des gens dormir (le loft) n'est rien d'autre qu'UNE FORME D'ALIENATION.
Le problème, c'est bien l'irruption de la réalité d'un économisme qui intervient comme facteur limitant de l'utopie. Dès que l'on défend ce principe limitatif, on devient un GENDARME de la pensée. Or l'avenir n'appartient à personne. Sans utopie, pas d'avenir. Soyons utopistes, soyons irréalistes !

Le réalisme qui s'appuie sur l'économique est, selon lui, dangereux. On a évacué toutes les superstructures (les idéologies) au sens d'Althusser. Marx sert aujourd'hui l'économisme, mais en matière de culture, on parle toujours d'Incalculable. Sinon, c'est la termitière, et nous serions des fourmis. Super-organisation, certes, mais, ça ne rigole pas tous les jours.

"Quand on a enfin trouvé la solution et qu'on l'applique, ce n'est plus la solution."

Il faut appliquer la stratégie du bouche à oreille, qualifiée de "virale" en marketing, et donc ALLER AU THEATRE, donner l'exemple, prôner la tolérance.

Puis, Daniel Mesguish lance un autre "pavé" sur le courage politique. La difficulté est toujours du côté de ceux qui combattent, séparent, analysent, déconstruisent. Il remarque que peu d'homme politique mouillent réellement leur chemise, vont voir des pièces, promeuvent un "jardin" qui souffre d'un manque dramatique de transmetteurs.

Une autre chose lui parait condamnable, en tout cas limiter la liberté de ton des artistes. La légèreté qui est exigée d'eux en permanence, eux étant sommés de produire du divertissement et de provoquer de l'audience. Dès qu'on cherche à aborder un problème sérieux, on ne peut plus parler.
On demande au discours d'être une image.

C'est une Totemisation qui est très loin de l'esprit d'Abraham.

Il faut sans cesse rigoler, dire une connerie, et ça, selon Mesguish, c'est un phénomène de gauche (Nouvel Obs, France Inter, etc).

Profitons du fait que nous soyons des occidentaux, pour dire quelque chose. C'est un droit absolu.

"C'est aussi une responsabilité quasi-historique. Dans un contexte de chappe de plomb venant peu à peu manteler des esprits qui ne peuvent plus s'exprimer librement, il est important d'engager un processus de Résistance Culturelle" (NDLR).

Danièle Buys, FNESER


"Notre héritage n'est précédé d'aucun testament."
René Char.

Danièle Buys parle avec passion de l'expérience quasi-défunte de l'expérience des nouveaux territoires de l'art, des quartiers lumières, de l'art pour lutter contre l'exclusion, suite à la disparition du cabinet Bérégovoy, et un article inouï d'Alain Peyrefittes qui dénonce cette expérience et la volonté d'assimilation, comparé à un processus digestif (sic) pour lequel le corps social ne disposerait pas d'assez de salive (sic) devant laisser les aliments indigestes (sic) sur le bord de l'assiette (sic). Madame Buys défend les nouveaux territoires de l'Art, qui ne sont pas défendus par le ministère Toubon et préfère parler désormais d'espaces de conquête populaire du champ culturel. Il y a un soucis des artistes de supprimer les médiateurs de l'Art. Attention aux risques d'une telle orientation, mais vive la liberté qu'elle peut permettre !


On assiste presque à une confiscation complète de l'espace culturel par un système institué. Les lieux de débat disparaissent et refluent, hormis, peut être sur le net (NDLR).

L'Art et la Création, contrairement à la Culture, ce serait ce qui pose problème.


Un intervenant signale un colloque sur la Paix, le 6 juin 2004.

"Eduquer les hommes, c'est réveiller leur courage" - Robespierre. comme quoi les erreurs d'interprétation dont parle Maurice-Ruben Hayoun, ont bien corrompu les milieux révolutionnaires français (de bonnes idées mal interprétées, suivies de traductions souvent désastreuses).

Table ronde animée par François Adibi, secrétaire de la section Culture

En conclusion, il appelle à transcender les thèmes abordés dans les réunions qui vont suivre et à travers les traductions qu'il faudra imaginer dans le cadre de l'éducation populaire.

Il s'agit, face aux mouvements ambiants qui cherchent à minimiser le potentiel de réalisation et d'émancipation de la culture, de transmettre, d'éduquer, de dire, d'être des professeurs es-liberté et es-nouveauté. Des résistants efficaces vis-à-vis du mouvement général actuel qui retire une à une leurs prérogatives à des hommes de plus en plus menacés d'être remplacés par des machines ou des salariés soumis, résignés au moins disant social (NDLR).

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