Au Liban, une sortie de crise se dessine après l'accord de Doha
Par Mouna Naïm


L'accord de Doha ouvre la voie à l'élection de Michel Sleimane à la présidence du Liban


A l'aube du sixième jour de négociations houleuses à Doha, capitale du Qatar, la majorité et l'opposition politiques libanaises sont parvenues, mercredi 21 mai, à un accord d'étape pour tenter de régler une crise politique de près de dix-neuf mois. Cet accord a été obtenu lors d'une conférence de dialogue organisée à la suite des tensions créés par le recours aux armes du Hezbollah et de ses alliés, début mai. Conclu grâce aux bons offices d'un comité ministériel arabe présidé par le Qatar, il ouvre une période de détente et de réactivation des institutions. D'autres aspects du contentieux interlibanais perdurent, dont l'apurement devra être poursuivi au Liban
.

L'accord en trois volets principaux prévoit l'élection "immédiate d'un président de la République ", étant entendu que celui-ci n'est autre que le candidat présenté comme consensuel, le général Michel Sleimane, commandant en chef de l'armée. Cette élection aura lieu "dans les 24 heures", a précisé, mercredi, le premier ministre qatari, cheikh Hamad Ben Jassem Al-Thani, au cours d'une cérémonie officielle à Doha.
 
Une Libanaise manifeste à Beyrouth, mardi 20 mai, et brandit une affiche appelant les représentants de la majorité et de l'opposition libanaises à ne pas revenir du sommet du Qatar sans un accord de gouvernement.

Le texte dispose en deuxième lieu que le futur gouvernement d'union nationale qui sera formé après cette élection comptera 30 membres ainsi répartis : la majorité y bénéficiera de 16 ministres, l'opposition de 11 portefeuilles, les trois titulaires restants devant être nommés par le président de la République.

Cette composition revient à accorder aux loyalistes une majorité et à l'opposition une minorité de blocage qu'elle réclamait depuis dix-huit mois. Le mandat du futur gouvernement sera obligatoirement d'un an à peine. Une autre équipe ministérielle devra être formée après les élections législatives du printemps 2009.

La formule adoptée à Doha modifie celle mise au point il y a plusieurs semaines par un conseil ministériel des 22 membres de la Ligue arabe pour aider les Libanais à aplanir leurs divergences. Cette feuille de route prévoyait qu'aucun des deux protagonistes ne disposerait du pouvoir d'imposer ou de bloquer une décision gouvernementale, l'arbitrage revenant au président de la République, par le biais des ministres qu'il aurait désignés.

BATAILLE DE TRACÉS


Dans son troisième volet, l'accord stipule que les élections législatives du printemps 2009 seront organisées sur la base d'une loi électorale remontant à 1960, assortie de certains amendements dans le découpage des circonscriptions de la ville de Beyrouth, représentée par 19 des 128 membres du Parlement.

En vertu de cette loi, les circonscriptions électorales seront de petites dimensions de manière à assurer une présumée meilleure représentation communautaire. C'est sur la configuration des circonscriptions de la capitale que le conflit entre les deux parties s'est cristalisé à Doha, voire s'est envenimé jusqu'à toucher parfois le point de rupture. Le nombre de circonscriptions (3) et de sièges est maintenu.

Désireux de garantir les meilleures chances de faire élire le plus grand nombre de leurs futurs candidats, les deux protagonistes se sont livrés pendant cinq jours à une bataille de tracés qui tenaient compte de données démographiques, communautaires et politiques. Car à l'image du pays, la population de la capitale est souvent répartie en zones à majorité confessionnelles et politiques claires.
Les nombreux autres volets du contentieux entre la majorité et l'opposition devront faire l'objet d'une nouvelle conférence de dialogue qui se réunira à Beyrouth, sous l'égide du président de la République "avec la participation de la Ligue arabe ". Les deux plus importants aspects de ce contentieux sont rappelés par l'accord de Doha.

L'évocation du "renforcement de l'autorité de l'Etat sur la totalité du territoire et sa relation avec les différentes organisations, de manière à garantir la sécurité de l'Etat et de ses citoyens " renvoie à la question de l'armement du Hezbollah et l'Etat dans l'Etat qu'il s'est taillé au Liban.

L'autre question est l'engagement de tous à ne pas recourir à la violence verbale et politique, mais surtout militaire, pour régler les problèmes intérieurs. Le premier ministre qatari, cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani, a précisé mercredi que l'accord comporte une clause interdisant tout recours aux armes à des fins politiques. Quant au président du Parlement libanais, Nabih Berri, l'un des leaders de l'opposition, il a annoncé la levée mercredi du sit-in observé par l'opposition depuis fin 2006 dans le centre-ville de Beyrouth.

Mai 2008

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